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Nicolas Vanier : 30 ans de passion du Grand Nord #MAGAZINE3

3 novembre 2016

Nicolas Vanier, interview exclusive

Prouver que la survie de l’humanité dépend d’un mode de vie en harmonie avec la nature, tel est le message de Nicolas Vanier. L’auteur d’ « Avec mes chiens » nous fait revivre son Odyssée Sauvage de 6000 kilomètres en trois mois. Embarquement immédiat pour la Sibérie, la Chine et la Mongolie…

Propos recueillis par Jocelyne Vidal– Article issu Magazine Terrésens 3- Editions Free Presse

« Vivre ses rêves plutôt que rêver sa vie »…Cette devise accompagne Nicolas Vanier depuis trois décennies dans les immensités glacées. Parti explorer à  dix-sept ans les vastes plateaux de Laponie, Nicolas Vanier renoue ensuite avec l’épopée des pionniers américains, en parcourant les sites les plus sauvages des Montagnes Rocheuses et de l’Alaska avec des chevaux, des chiens de traîneau, un radeau de sapin et deux canoës indiens.

De la Sibérie au Grand Nord canadien, en passant par la Place Rouge où glisse son traîneau à chiens, le voyageur du froid transforme chacune de ses odyssées en hymne à la nature, doublé d’une quête politique. Prouver que la survie de l’humanité dépend d’un mode de vie en harmonie avec la nature, tel est l’objectif de ses nombreux films, de ses trente ouvrages dont le dernier Avec mes chiens (XO Editions), nous fait revivre à un rythme époustouflant, une Odyssée Sauvage de 6000km à travers la Sibérie, la Chine, et la Mongolie jusqu’au lac Baïkal. A 52 ans, Nicolas Vanier n’est pas près de raccrocher ses gants de fourrure.

 Lors de votre départ pour l’Odyssée Sauvage de 6000Km parcourus en trois mois au cours de l’hiver 2013-2014, vous aviez du mal à réaliser que vous étiez vraiment parti. Pourquoi ?

 Quand je me retrouve là-haut, dans ce que j’appelle le Nord de l’hiver, j’ai l’impression que le temps s’est compressé. Le temps de vider mon traîneau, rangé depuis trente ans de la même façon, je retrouve mes gestes, mes marques et mes réflexes, comme si j’avais toujours vécu dans le Grand Nord où j’ai le sentiment d’être chez moi. Je m’y sens tout aussi bien que dans la maison de mon autre vie, en Sologne.

 En fait, qu’est-ce qui vous aimante depuis trente ans au Nord de l’hiver ?

 Tout ce qui compose ces paysages m’attire, à commencer par leur pureté, le silence et la beauté de certains sites. Tel le lac Baïkal, aux eaux d’une transparence cristalline. La lumière réfléchie par les milliers de fissures de la glace, les montagnes qui tombent à pic dans ce lac d’une profondeur unique au monde : six cents mètres…Tout cela est pour moi une ode à la beauté de la planète.

paysage nicolas vanier

 Vous évoquez aussi l’hospitalité des populations, la pureté d’un monde où contrairement au nôtre, ce que l’on fait a plus d’importance que ce que l’on dit…

 Effectivement, voyager dans un pays comme la Russie où l’on se sent partout le bienvenu, est pour moi quelque chose d’extraordinaire. Toutes expéditions confondues, j’ai passé plus de trois ans en Sibérie, j’y ai parcouru près de vingt mille kilomètres en rencontrant une multitude de gens…A chaque fois on m’a offert spontanément le gîte et le couvert dans les maisons, les cabanes dont j’avais simplement poussé la porte. Une belle leçon de savoir-vivre pour les Français, au pays réputé pour être l’un des moins accueillants au monde.

 Le froid ne supporte pas l’erreur, comme vous le rappelez en évoquant la mort d’un groupe d’allemands dans le Yukon. Quels ont été les moments les plus durs de cette Odyssée Sauvage ?

  Avec l’expérience qui exige d’avoir toujours sur soi de quoi allumer un feu, le froid n’est pas un problème. La glace en revanche, par la fragilité de ses couches plus ou moins épaisses, peut se révéler très dangereuse. Il m’est arrivé deux ou trois fois de passer à travers et là, il faut faire vite, remonter à la surface , s’extraire immédiatement d’une eau à zéro degré, allumer aussitôt un feu pour résister à des températures de -20 à -30°. Il faut enchaîner rapidement les gestes qui protègent du froid. On est plus démuni face au vent qui nous a asséné des claques monumentales, à 80 kilomètres du petit village de Mongolie orientale de Bayan-Adarga. Les rafales soufflaient si fort que nous ralentissions jusqu’à l’immobilisation, puis les chiens repartaient comme des boxeurs au combat.

Vanier chiens

  Dès l’Odyssée Sibérienne, publiée en 2005, vous dénonciez les désastres écologiques infligés à notre planète. Quels effets du réchauffement climatique avez-vous pu constater lors de l’Odyssée Sauvage ?

  Confrontés au manque de neige, nous avons dû recourir au kart pour certaines étapes de l’expédition qui nous a permis de mesurer l’ampleur des dégâts liés au réchauffement climatique. Des inondations ont fait monter le niveau de certains fleuves sibériens de plusieurs mètres, détruisant les berges, arrachant des pans entiers de la forêt, rayant de la carte plusieurs villages…Ce qui inquiète beaucoup les scientifiques, c’est la fonte accélérée des sous-sols gelés appelés «  permafrost ». En fondant, ils libèrent des quantités de carbone et de méthane, un gaz à effet de serre particulièrement redoutable.

Comment avez-vous réagi aux informations mensongères données sur vous et sur le camp de Vassieux-en-Vercors ?

« L’affaire des chiens du camp » véhiculée alors que j’étais en Chine, par les réseaux sociaux et des médias peu scrupuleux, relève de la calomnie. Comme je le rappelle sur mon site (1) je n’ai jamais eu  de problèmes avec la SPA, association qui n’a jamais accueilli le moindre chien qui m’appartienne, des informations qu’il aurait été facile de vérifier auprès de la SPA, de la Préfecture de la Drôme, de notre vétérinaire et des mushers professionnels. Bref, le soufflé est retombé aussi vite qu’il était monté !

Dans quel état d’esprit abordez-vous les deux plus grandes courses de chiens de traîneau au monde, la Yukon Quest et l’Iditarod ?

  Mes chiens et moi sommes en pleine préparation physique pour que tout se passe bien au Canada et en Alaska, sur la piste des plus grandes courses du monde. Je les rejoins la semaine prochaine dans les Rocheuses, pour trois mois d’entraînement intensif, jusqu’au départ de la Yukon Quest en février 2015. Un an plus tard, en mars 2016, nous concourrons à l’Iditarod. Ces courses me donnent l’occasion de retrouver avec mes chiens, une complicité aussi totale que celle de l’Odyssée Sauvage. Il me reste encore quelques pages blanches à écrire avec eux !

chiens nicolas

(1)www.nicolasvanier.com

©Nicolas Vanier

 

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