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Les clés d’une bonne construction en montagne – MAGAZINE #6

24 mai 2018

De nouvelles pistes environnementales explorées par les architectes Serge Gros et Jean-François Lyon-Caen incitent à « repenser entièrement les matériaux de construction en montagne où vont s’inventer de nouveaux arts d’habiter ».

Propos recueillis par Jocelyne Vidal – Article issu du Magazine Terrésens 6

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Le béton va-t-il devenir tabou à la montagne ?

Serge Gros, directeur du CAUE (Conseil Architecture Urbanisme Environnement) de l’Isère :
« Comme chacun sait, les constructions en béton vieillissent mal, notamment en montagne où l’on est soumis en toute saison à de fortes amplitudes thermiques. Qu’elle se situe en altitude ou dans la vallée, « la construction d’un immeuble ou d’une maison doit corriger les défauts, ramener de la valeur au secteur où elle s’inscrit en améliorant la qualité de l’environnement et de l’espace public. Alors, si l’on ne veut pas blesser la montagne des stigmates de constructions que l’on ne supporterait plus en ville, mieux vaut limiter l’usage du béton, un matériau qui se trouve d’ailleurs fragilisé par l’amenuisement des réserves planétaires de sable. »

À quelles priorités est soumise une construction en altitude ?

Jean-François Lyon-Caen, architecte et responsable scientifique de l’équipe de recherche Architecture, Paysage, Montagne de l’École Nationale Supérieure d’Architecture de Grenoble :
« Le premier choix à opérer pour construire en montagne est celui de l’orientation. L’architecture captante d’une maison tournée vers le soleil, lui permet d’accumuler l’énergie reçue par l’intermédiaire d’un sol rendu étanche à l’air et à l’écart thermique. Pour les matériaux de structure, le bois aux essences certifiées « Bois des Alpes » (1) garantit les qualités techniques de résistance mécanique et de séchage répondant aux attentes du marché. Cette certification assure également la traçabilité de bois issus de forêts gérées durablement, avec un périmètre de transformation arrêté au massif alpin et aux départements limitrophes. »

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Quels sont les matériaux de structure incontournables ?

J.L.F.C. « Le bois et le verre. Construire en « Bois des Alpes » établit une chaîne de valeur optimale entre la forêt et le bâtiment. Lequel se prête à deux types de construction : la maison à ossature bois au caractère artisanal ou la maison faite de panneaux KLH de bois massifs contrecollés de grande dimension et mis en œuvre d’un seul tenant, selon les techniques d’une entreprise autrichienne du Voralberg. Gage d’une meilleure étanchéité à l’air, ce procédé se développe beaucoup en France. Troquer la traditionnelle baie vitrée contre un mur de verre Securit à toute épreuve, rien de tel pour cultiver la performance énergétique passive d’une maison que l’on pourra équiper de stores auto-réglables, en fonction des heures où le soleil frappera le verre et réchauffera le sol qui en restituera la chaleur. »

Parlons des musts de l’isolation

J.L.F.C. « Côté isolants, les résultats thermiques effectifs et durables du Foamglass, plaques de bulles de verre cellulaire issues de bouteilles et de vitres de voiture recyclées, en font un «must» du secteur. Présenté sous forme de plaques étanches à l’air et à l’humidité, il isole aussi bien les sols que les murs et les toitures. Composé de verre pur, dont près des deux tiers sont en provenance de verre recyclé à partir de vitres de voiture et de verre plat, ce produit incombustible peut être lui aussi recyclé en fin de vie ou réutilisé. »

Quels sont les autres isolants les plus adaptés à la montagne ?

J.F.L.C. « En matière d’isolation, les matériaux biosourcés ont également le vent en poupe. Issus par définition, des matériaux issus de la biomasse d’origine végétale ou animale, ils trouvent de multiples applications dans le domaine du bâtiment : laines de fibres végétales ou animales, de textile recyclé, ouate de cellulose, chènevotte, anas ou produit du défibrage des tiges de chanvre et de lin, sans oublier la paille de riz, aux qualités isolantes très prisées par les constructeurs de maisons à ossature bois. Ajoutons la conductivité thermique exceptionnelle de la paille, pour en faire un isolant à l’excellent rapport qualité prix, digne d’isoler 500 000 logements par an, si l’on utilise seulement 5 % de la paille qui retourne au sol en France. Le déploiement des matériaux biosourcés dans le monde de la construction qui consomme près de 60% des matières minérales extraites, montre que ses acteurs s’engagent résolument sur la voie de la transition énergétique, pour produire des bâtiments à énergie positive et bas carbone. »

(1) Guide « Bois des Alpes » à télécharger sur le site www.boisdesalpes.net

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